Au détour d'une rue / At a street corner

Auteur : Inconnu - Source : inconnue

Il faisait chaud... et pourtant j'avais décidé d'aller flâner dans les rues de mon village. Chaque jour, je passais devant cette porte qui me fascinait autant qu'elle m'intriguait. Aux heures les plus chaudes alors que je savourais la brise qui s'engouffrait dans les petites ruelles, je restais quelques instants devant cette entrée. 

Parfois j'entendais des rires d'enfants mêlés aux bruit des vagues qui venaient s'écraser sur les falaises sur lesquelles étaient construites ces vieilles bâtisses en pierre. Puis à d'autres moments le silence. 

Je me demandais si cette porte s'ouvrait sur un jardin botanique ou bien si elle masquait la vue imprenable sur l'océan. Si les reflets de l'eau renforçait ce vert au point de lui donner un éclat émeraude unique. Si un escalier en colimaçon guiderait mes pas jusqu'à ce lieu magique et onirique que je m'imaginais dès que je fermais les yeux. Le saurai-je un jour? Je l'ignore. 

Depuis vingt ans, je parcours cette ruelle et jamais la porte ne s'est ouverte malgré mes nombreux passages. J'ai peut-être dû entendre des bruits de pas semblant venir derrière les maintes fois où je m'asseyais sur le banc en fer forgé situé juste en face. 

Je pouvais y passer des heures, les yeux rivés sur cette porte. Parfois le banc était à l'ombre et parfois le soleil réchauffait ce métal jusqu'à le rendre inaccessible et pourtant j'y prenais place pour me délecter du soleil mais aussi des parfums qui volaient au gré du vent. 

Ça sentait le sel, l'iode et la lavande mais aussi l'odeur de la ratatouille de Mme Colin et des épices du tajin de Mme Bensaïd qu'elle cuisinait chaque mercredi. 

Je ferme les yeux et je souffle. 

Une dernière fois. Amère, triste et joyeuse...

Triste de savoir que je ne saurais jamais ce qui se cache derrière ce bois peint malgré mes investigations auprès des voisins. 
Amère de quitter ce lieu qui avait illuminé mon enfance et mon imagination. J'allais quitter cet endroit pour rejoindre la faculté aux premières lueurs de l'aube. Cet endroit allait me manquer mais ma pellicule se chargerait de me tenir près d'ici.

...Clic...
J'affichais ce sourire de joie car l'objectif de mon argentique venait de figer cette vue riche en couleur. Je la développerai dans le cabanon puis elle retrouvera les autres... celles qui me rappelleront ce lieu... pourtant celle-ci aura une place plus particulière.
Elle trouvera une place dans mon nouveau chez moi... me permettant ainsi de continuer de rêver et d'imaginer les secrets que cette porte pouvaient garder pour elle. Elle entretiendra mon imagination jusqu'à la prochaine porte qui éveillera ma curiosité mais peut-être ne trouvera-t-elle pas de concurrente parce que ce lieu fait partie de ma mémoire, celle de mon coeur, celle de mon âme, celle de mon enfance...

MT 2014.05.27

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