Chapitre Neuf


POV BELLA

J'étais contente de la voir car cela faisait plusieurs jours que nous ne nous étions pas vues. Elle travaillait beaucoup et souvent très tard. Nous avions parlé de son nouveau poste et de la façon dont ça s'était passé. Elle avait trouvé un stage quelques semaines plus tôt mais suite à des divergences d'opinion avec la responsable marketing, elle avait claqué la porte. Je lui avais dit, à ce moment-là, qu'elle réagissait comme un enfant gâté mais elle m'avait envoyé balader gentiment. Ayant obtenu son diplôme au début du mois de juin, elle avait été contactée par une agence qui s'occupait de conseils en image et relooking. Elle travaillait chez eux depuis presque deux semaines et son planning ne désemplissait pas. Le seul souci, c'est qu'entre ses horaires et ceux de Jazz, ils ne se voyaient presque plus. Elle m'expliquait qu'elle n'avait pas le choix mais que d'ici quelques mois, une fois que l'agence ne pourra plus se passer d'elle, elle pourra alors négocier son planning. Nous avions abordé mes deux dernières semaines et elle semblait ravie que je me sois rapprochée de Rosalie. Elle voulait d'ailleurs qu'on organise un repas tous les cinq afin de passer un bon moment tous ensemble. Nous avions aussi parlé de mon travail à la galerie et de la demande d'Esmée au sujet d'exposer mes toiles. Elle trouvait que c'était une très bonne idée. Mes toiles méritaient d'être exposées selon elle. Puis je lui avais parlé de ma soirée chez les Cullen, du fait qu'Edward était là et de mon troublant ressenti face à lui.

« Tu savais qu'il serait là ? » me demanda-t-elle.

« Non, mais Rosalie était au courant ! »

« Comment a-t-elle pu te faire un coup pareil ! Elle sait ce qui s'est passé pourtant ! J'en reviens pas !»

« Lili, c'est pas grave, elle... elle voulait juste qu'on se parle, elle était persuadée qu'il regrettait, j'ai eu du mal à la croire mais... il m'a présenté ses excuses et il semblait.. comment dire... sincère ! »

« Sincère, non mais Bella, ce mec couche avec toi et ne te donne pas signe de vie pendant des mois et toi tu acceptes ses excuses ! Non mais dis-moi que je rêve ! » dit-elle un peu sèchement.

J'essayais de la calmer car je commençais moi même à être quelque peu en colère contre elle. Je savais qu'elle n'aimait pas Edward mais elle ne le connaissait pas vraiment et elle se permettait de le juger. Qui ne s'est jamais amusé de cette façon! … toi … la seule fois où tu t'es permise un coup d'un soir ça a été une véritable catastrophe … Il s'amusait avec les femmes en règle générale mais quelque chose dans son attitude de ce soir était bizarre.

« Alice s'il te plaît ! Il s'est excusé et Emmett m'a dit qu'il le faisait très rarement donc ! Et puis je sais pas.. il avait ce truc dans le regard ! »

« Ce truc dans le regard ! Non mais j'hallucine ! Bella, ce mec séduit tout ce qui bouge dans un seul objectif, prendre son pied et peu importe comment ! Je me demande quel intérêt tu peux lui trouver

« Alice, il m'a déjà eu sur ce coup-là, et d'après tes dires, c'est UNE fille, UNE nuit, donc je vois vraiment pas où tu veux en venir ! Et puis de toutes façons, tu ne l'aimes pas et j'en ignore les raisons mais bon ça ne te donne pas le droit de le juger ! Tu n'étais pas là ce soir ! » finis-je en haussant légèrement le ton

« Bella! Putain mais ouvres les yeux ! Il en a rien à foutre de ta gueule, il a couché avec toi et certainement qu'il a tenté de t'amadouer encore une fois pour te remettre dans son lit faute de mieux ! C'est un connard, supplanté d'un narcissique arrogant ! Il se fout des femmes ! Il joue avec, se moquant éperdument de l'après et de leur plaisir ! » me cria-t-elle.

« C'est là que tu te trompes Alice, il s'est préoccupé de mon plaisir avant le sien ! » repris-je sur un ton doux malgré la colère qui commençait à bouillir en moi.

« Et alors, ça n'empêche qu'il t'a pris pour une conne et toi t'es tombée dans le panneau de son jeu de séducteur ! Franchement je vois pas pourquoi tu prends sa déf.. non... ne me dis pas que... »

« .. que quoi Alice ? » dis-je perplexe.

« Bella ne me dis pas que tu ressens quelque chose pour cet.. cet.. espèce d'enfoiré ! »

« .. » Je me sentais mal à l'aise et je ne savais pas quoi lui répondre. Je pensais souvent à lui mais je ne m'étais jamais vraiment posé la question.

« Bella ? »

« Non, Alice, disons..que oui, peut être que je ressens quelque chose pour lui mais.. »

« Bella, tu vas encore souffrir et je n'ai absolument pas envie de ramasser les morceaux encore une fois ! Comment peux-tu ressentir quelque chose pour quelqu'un qui t'a pris pour une pute ! » dit-elle sèchement.

Ce mot fut la goutte d'eau qui fit exploser ma colère. Elle l'insultait depuis le début de notre échange et là elle venait carrément de m'insulter moi.

« Alice, tu me prends pour qui ! »

« De quoi est-ce que tu parles ! »

« De ce que tu viens de dire ! Tu crois que je suis une pute parce qu'il a réussi à me mettre dans son lit ! »

« Tu veux appeler ça comment ! Pour lui tu n'es rien qu'une salope de plus à ajouter à son tableau de chasse ! »

« Putain ! C'est avec Benjamin que t'aurais dû te mettre en couple, vous auriez fait la paire, vous avez le même langage ! »

« Bah lui au moins, il t'a pas prise pour une pute ! »

« Non c'est vrai, il m'a tabassé, il m'a presque cassé le bras, il m'a insulté et j'ai failli me faire violer ! Mais c'est vrai que c'est rien comparé à la manière dont Edward s'est comporté avec moi ! »

« Je .. »

« Non Alice ! J'ai décidé de coucher avec lui ! Si je l'avais repoussé, il ne m'aurait pas forcé la main ! Alors tu vas arrêter tes insinuations douteuses et me foutre la paix ! Si j'ai envie de ressentir quelque chose pour lui ça me regarde, si j'ai envie de coucher à nouveau avec lui, ça me regarde aussi, si j'ai envie de lui parler, c'est mon droit ! Est-ce que c'est clair ! »

« Oui mais tu ne pourras pas dire que je ne t'ai pas prévenue et ne viens pas pleurer après ! »

« Alice, je suis assez grande pour gérer ma vie toute seule, je n'ai ABSOLUMENT pas besoin de toi ! J'ai entendu ce que tu m'as dit maintenant c'est MA vie et JE décide ! Mais puisque tu sembles ne pas vouloir entendre ce que JE te dis ! On va s'arrêter là ! Je pensais que tu étais mon amie ! Mais je ne peux pas tolérer ce genre de jugement vis à vis d'une personne que tu ne connais même pas ! »

« Ah parce que tu le connais mieux que moi peut-être ! » reprit-elle.

« Oui Alice, j'ai passé plus de 24h avec lui sur une semaine, nous avons parlé et j'ai appris beaucoup de choses sur lui ! Et je ne prétends pas le connaître contrairement à toi qui l'accable de choses et d'actes dont tu n'as aucune preuve »

« Oh mais Jazz m'a bien dépeint le tableau et puis une de mes amies aussi ! »

« Oh mais oui tu as l'air de savoir beaucoup de choses ! » dis-je sarcastiquement.

« En effet ! »

Je me levais d'un bond, le doigt pointé vers elle et je décidais de lâcher tout ce que je retenais depuis des mois afin de préserver notre amitié.

« Et bien dans ce cas-là Alice, tu vas prendre tes affaires et te casser de chez moi ! Si tu veux jouer à ce jeu là avec moi, t'es mal barrée ! J'en ai marre, ça fait des semaines que tu m'emmerdes avec tes remarques désobligeantes sur ma vie, sur Edward et sur ce que je décide ou pas de faire ! J'en ai ma claque que tu ne veuilles rien entendre, ni rien tolérer ! Je pensais qu'après mon agression, tu avais compris ! J'attendais juste de toi que tu me soutiennes et non pas que tu me juges ! C'est ce qu'est censé faire une amie! Mais tu es trop … je ne te reconnais plus Alice ... Alors prends tes affaires et casse-toi, tu connais la sortie ! »

[ « Cache -Cache » - Ludvico Einaudi]

Je me dirigeais vers ma fenêtre et je mis à fixer un point imaginaire. J'avais les poings serrés et je tentais de maîtriser ma colère. J'avais failli la gifler mais au lieu de ça, j'avais serré les poings si forts que j'avais sentis mes ongles pénétrés dans ma chair.

« Bella, je.. »

« Non Alice, j'ai pas envie de discuter, j'ai plus envie d'écouter tes excuses... va t'en. S'il te plaît » finis-je.

J'avais les larmes aux yeux. Mon amie ou tout du moins celle que je considérais comme telle, était devenue un personne froide et égoïste. J'entendis la porte claquer. Elle venait de partir. Mes larmes s'étaient alors mises à couler. Je regardais dehors. Il y avait des gens qui discutaient et riaient dans le square. Ils devaient être amis. A bien les observer, on pouvait les voir se toucher les bras, se taper l'épaule de manière amicale et se courir après comme des enfants. Deux autres adultes se balançaient sur les balançoires qu'occupaient habituellement les enfants. Ils souriaient. L'amitié, une belle valeur mais qui peut tout comme l'amour vous blesser et vous faire souffrir. Je connaissais Alice depuis trois ans et j'étais ravie qu'elle soit mon amie. Elle savait tout de mon histoire, l'accident, l'hospitalisation de ma mère, mes angoisses des hôpitaux, la mort de ma mère, mon enfance solitaire et ma rupture brutale avec mon ex. Elle avait toujours été là pendant mes moments de déprime à mon arrivée dans cette grande ville. Nous avions beaucoup ri ensemble. Elle avait toujours été de bons conseils me sermonnant toujours sur le fait que je devais avoir plus confiance en moi. J'y étais arrivée, j'étais devenue la femme forte et indépendante que j'avais promis de devenir à ma mère sur son lit de mort. Mais je ne sais pour quelles raisons, elle avait subitement changé de comportement. Elle était devenue méchante, jugeant tout ce que je pouvais dire ou faire. Mes choix n'étaient jamais les bons. Il suffisait que je me souvienne lorsque je lui avais annoncé que je voulais appeler Edward, après avoir plaqué Benjamin. Elle avait été agressive, me disant que je faisais une belle connerie, que ce mec m'enverrait paître et que de toutes façons il n'était pas assez bien pour moi. Elle m'avait même dit qu'il avait une copine et qu'il semblait être heureux avec cette fille. Alors j'avais écouté ses conseils, encore une fois. J'aurais pu demander son avis à Rosalie mais je ne l'avais pas fait. Je ne la connaissais pas suffisamment. Mais depuis de l'eau a coulé sous les ponts. Edward était-il seul ? Peut-être. Peut-être pas. De toutes façons, je ne voulais pas le revoir, je le lui avais dit. … Oui tu lui as dit... et puis quoi ! Tu veux quoi... une histoire avec lui... jamais il ne se restera avec quelqu'un... et pourtant ce regard qu'il m'a lancé quand il s'est excusé... je ne sais plus.. oh si tu sais... tu continues ta vie... et le reste suivra... protège-toi... avance.. et le reste suivra... laisse le temps... Je ne sais pas combien de temps j'étais restée comme ça mais quand je repris pied dans la réalité, j'avais un besoin irrépressible de peindre. J'avais mis mon mp3 sur mes oreilles et un morceau des PixiesWhere is my mind ») résonnait dans mes écouteurs. 

J'avais alors attrapé une toile vierge et mon matériel. Je me saisissais de ma peinture acrylique et de mon matériel. Je commençais à enduire le fond. Puis j'attrapais mon fusain afin de dessiner. Mes mains s’affairaient sur la toile, dessinant les contours, les traits toujours aussi fins appuyant plus ou moins fort selon l'ombre que je voulais obtenir. Puis avec une éponge humide j'essuyais le tout pour donner un aspect lavé à ce que je venais de réaliser. Je pris alors possession d'un de mes pinceaux et je le faisais onduler sur mon tableau, toujours plus vite, appuyant plus fortement à certains endroits comme si en enfonçant le pinceau, j'allais incruster ma douleur sur la toile. Ma mère me manquait. Si elle avait été là, j'aurais pu me confier à elle. Mais je n'avais plus personne. Alors comme depuis mes huit ans, je peignais. Je fixais ma toile. Il manquait quelque chose. Alors j'attrapais mes feuilles de papier crépon et les déchiraient en fines bandes. Je les appliquais ensuite avec de la colle spéciale sur ma toile. Je repris mon fusain et traçait à nouveau les lignes désormais masqués par le papier. Puis avec un pinceau, je projetais de la peinture rouge en jetant violemment mon pinceau en avant. Éclaboussant mon travail de sang, projetant ma rage sur ce visage que je venais de dessiner. Celui de ma meilleure amie. Puis je continuais à dessiner, à peindre, à assembler et à déchirer de telle sorte qu'au bout de quatre heures, toute ma colère s'était déposée sur ma toile. Je me sentais bien mieux. Je me laissais alors tomber sur mon canapé, épuisée, et je restais là, les yeux fixés sur ma toile. Mon esprit était vide et mon cœur … et bien il semblait un peu moins douloureux. 
Je venais de rentrer chez moi. Mon téléphone se mit à sonner. Je décrochais et en même temps quelqu'un frappa à la porte. J'ouvris et là deux policiers se tenaient devant moi. Je m'excusais auprès de la personne que j'avais au téléphone même si personne n'avait pris la parole à l'autre bout du fil. Les deux policiers semblaient embarrassés, mal à l'aise. 

« Mademoiselle Swan ? »

« Oui, que puis-je pour vous ? »

« Nous n'avons pas de bonne nouvelles... »

Dring... dring... Je me réveillais en sursaut complètement en sueur et le cœur battant à tout rompre dans ma poitrine. Mon téléphone sonnait toujours sur la table basse du salon. Je l'attrapais et décrochais.

« Bella ? »

« Oui ! »

« C'est Emmett ! Ça va bien ?»

Je regardais l'heure qu'il était. 9h. Je me levais afin d'étirer mes muscles endoloris par ma nuit sur le canapé.

« Oui, je viens de me réveiller en sursaut ! Qu'est ce qui se passe pour que tu m'appelles si tôt ? »

« Et bien tu es chez toi ou pas ? »

« Oui pourquoi! »

Étant donné le rêve que je venais de faire, j'avais peur qu'il soit arrivé quelque chose de grave.

« Je... on voudrait passer avec Jazz. On.. on aurait un service à te demander ! »

« Oui pas de souci ! »

« On sera là dans une demi-heure c'est bon ? »

« Oui, je vous attends ! »

« A toute de suite Bee ! »

« A toute ! »

Je rangeais rapidement mes affaires et fonçais à la douche. Je m'habillais. Vingts minutes plus tard j'étais prête. Je préparais du café. 
Emmett et Jazz venaient d'arriver. Jazz semblait tendu et ennuyé aussi. Ils m’enlacèrent l'un après l'autre. 

« Ça me fait plaisir de vous voir tous les deux ! » dis-je.

« Nous aussi, on s'excuse de te sortir du lit si tôt, la marmotte mais on a besoin de savoir si tu pourrais enfin.. si tu pourrais rendre service à Jazz ! » me dit Emmett.

Je m'installais dans mon fauteuil, une jambe repliée sous mes fesses et l'autre pliée de telle sorte que mon talon reposait sur le bord du fauteuil. Je tenais ma tasse à café dans les mains. Les garçons étaient assis sur mon canapé et s'échangeaient un regard pour savoir qui allait m'expliquer ce dont Jazz avait besoin.

« C'est pas grave ! Dites moi de quoi il s'agit de sorte que je puisse savoir si je peux rendre service à Jazz ! »

« Bon, et bien Alice est passé te voir hier il me semble ! » me dit Jazz.

« Oui mais on en peut pas dire que ça se soit bien passé, je l'ai mise à la porte et pour l'instant je ne veux pas la voir ! »

Aucun d'eux ne semblait surpris mais Jazz étant le petit ami d'Alice, je me doutais qu'elle avait dû lui en parler.

« Ouais, on est au courant » me dit Emmett.

« Y a un souci Jazz, qu'est-ce qu'elle t'a dit ! » lui demandais-je perplexe.

« Bah en fait, elle est rentrée comme une furie à la maison. Elle m'a expliqué que tu avais vu Edward, hier soir et qu'elle t'avait mise en garde par rapport à lui mais que tu n'as pas voulu l'écouter, lui trouvant toujours une excuse » commença Jazz.

« C'est exact mais il n'y a pas que ça ! Elle pense devoir gérer ma vie et elle voudrait que je suive ses conseils ! Or je sais gérer ma vie et ses remarques désobligeantes à mon propos ou sur les choix que je fais commençaient sérieusement à m'insupporter. Je pensais que la discussion que nous avions eu après mon agression l'avait fait réfléchir mais apparemment, je me suis trompée »

« Ouais ! Enfin bref je me suis prise la tête avec elle à ce sujet. Je lui ai expliqué qu'elle devait te foutre la paix et te laisser prendre les décisions qui te semblaient justes et qu'elle devait te soutenir dans ce sens. Elle m'a piqué une colère monstre dépassant largement les limites. En plus je n'ai pas hésité à lui dire que je n'étais pas son gosse et que je menais ma vie comme je l'entendais et qu'il fallait qu'elle arrête de tout vouloir diriger. Tu dois te douter qu'elle n'a pas apprécié ! » me dit Jazz très calmement.

« Ça je me doute, je ne sais pas ce qu'elle a mais ses derniers temps, elle est devenue invivable. Elle se mêle de tout, donne son avis sur tout mais c'est encore pire qu'avant car elle se permet de juger. Elle n'avait jamais fait ça avant ! »

« Je sais, du coup je suis parti en lui disant que malgré le fait que je l'aimais, je ne pouvais pas rester avec une fille qui se comportait de la sorte. Elle a essayé de me retenir mais je lui ai dit que j'avais besoin de prendre l'air. Et hier soir j'ai dormi chez Emmett »

« Tu vas rester chez Emmett ou tu retournes chez vous ? » demandais-je.

« Et bien, c'est de ça qu'on voulait te parler » me dit Emmett.

« Qu'est ce que vous voulez ? »

« Est-ce que Jazz pourrait emménager chez toi quelques temps. Notre appart avec Rose est trop petit et toi je sais que tu as une pièce supplémentaire. Et puis avec l'histoire de la fille qui rode autour de chez toi, on s'est dit avec Rosalie que ça pourrait être une bonne idée, comme ça tu serais pas seule. »

« Je veux bien mais la deuxième pièce c'est l'endroit où je stocke mon matériel de peinture et y a pas trop de place ! Mais j'ai le canapé si tu veux » dis-je en m'adressant aux deux.

« Bella, je resterais pas longtemps, c'est juste le temps de trouver un autre appart ! »

« Tu es sûr de ne pas regretter par la suite ta décision ! Tu pourrais attendre avant de chercher autre chose. On sait jamais si ça recolle entre vous ! Non ? »

« Regretter. Non ! Ça faisait un moment que je ne supportais plus ces remarques à ton propos ou à propos d'Edward ! Et en ce qui me concerne, elle dirigeait tout pour moi alors qu'à 27 ans, j'ai passé l'âge d'être pris en charge. »

« Et tu t'installerais quand ? »

« Euh.. cet après-midi c'est possible ! »

« Oui Jazz pas de souci ! Je vais ranger un peu mon « atelier » de manière à pouvoir tirer le canapé et le déplier ! »

« T'inquiète pas pour moi Bella ! Je me ferais tout petit ! »

« Je ne m'inquiète pas et tes affaires ? »

« On va y aller avec Emmett cet après midi. Alice travaille donc je vais en profiter pour récupérer mes affaires. »

« D'accord ! Bon de toutes façons, je ne comptais pas bouger aujourd'hui ! Passez moi un ti coup de fil avant de partir de chez Jazz okay ! » dis-je à Emmett.

« Okay ! » me répondit Emmett.

« Merci Bella ! Sincèrement ! » me répondit Jazz en souriant.

« Ne me remercie pas, tu risques d'être vite saoulé par moi. Je peins à toute heure du jour et de la nuit, j'écoute la musique a un volume élevé et en plus je suis hyper bordélique ! » dis-je en rigolant.

Jazz était venu faire claquer un bisou sur ma joue et Emmet fit de même. Ils terminèrent leur café et repartirent ensemble. 
Je décidais de commencer à ranger un peu mon autre pièce. Je n'avais pas encore eu le courage de le faire et la venue de Jazz allait être profitable puisqu'elle allait me permettre de mettre de l'ordre. Ce qui m'arrangerait, car une fois qu'il partira, je pourrais aménager cette pièce en véritable atelier. Je branchais la station de mon Ipod et la guitare de Lauryn Hill résonna dans mon appartement, « I remember ».
Je commençais par attraper les cartons. Comme j'avais inscrit sur les cartons ce que j'avais mis à l'intérieur, je n'avais plus qu'à trier. J'attrapais les quatre cartons qui contenaient les albums photos de l'époque où j'étais enfant. J'avais conservé tous ces albums car c'était tout ce qu'il me restait comme souvenirs de ma mère. J'avais tellement peur d'oublier son visage, la couleur de ses yeux, de ses cheveux et son sourire que je n'avais pas pu m'en défaire. Mon père m'avait proposé de les garder à la maison mais je n'avais pu me résigner à les laisser là-bas. Dans ces cartons, il y avait aussi quelques dessins que nous avions faits ensemble quelques mois avant l'accident. Je les regardais les uns après les autres me ramenant à une période heureuse de ma vie. Je tombais sur la toute dernière toile que nous avions peinte ensemble. Je me souviendrais toujours de la réaction de mon père en rentrant à la maison ce soir-là.

Flashback :  

J'étais installée sur un plaid dans le jardin et je lisais un des livres que ma mère adorait, « L'Alchimiste » de Paolo Coelho. Ma mère était dans la cuisine et avait commencé à préparer le gâteau pour le repas du soir car nous avions des invités pour le dîner. La journée était très agréable pour ce début de mois de juin. Le ciel était d'un bleu azur et une légère brise soufflait dans mes cheveux défaits. Le soleil était au zénith et je sentais sa chaleur sur ma peau diaphane. J'étais plongée dans la lecture et c'est le son de la voix de ma mère qui me sortit de ce voyage extraordinaire que faisait Santiago pour entreprendre de trouver un trésor. Son trésor. 

« Bella ma chérie, j'espère que tu as mis de la crème ! » 

« … » Je ne lui avais pas répondu trop absorbée par la lecture de mon livre.

« Je ne voudrais pas que tu attrapes un coup de soleil ! » 

« Oui M'man ! » répondis-je sans prêter attention à sa réponse. 

Je replongeais dans ma lecture quand le bruit particulier de la porte de notre « atelier » résonna dans la maison. Ma mère et moi avions transformé l'ancien bureau de mon père en atelier de peinture et la porte avait tendance à émettre un petit craquement dès qu'on l'entrouvrait. Je me levais d'un bond et je courus pour rejoindre ma mère qui venait de pénétrer dans cet espace. Je venais de franchir la baie vitrée du salon et mon regard se porta vers la porte entrouverte.  

« Maman ! » 

 « Oui ma puce, je suis dans l'atelier. » 

« Je sais ! » dis-je alors que j'approchais de la dite pièce.  

« Tu veux faire une toile avec moi, j'ai fini de préparer mon repas et je me disais que.. » 

« Oui très bonne idée » la coupais-je. 

Ma mère était en train de sortir une nouvelle toile et le matériel nécessaire. Je la regardais faire. Elle avait les yeux qui brillaient comme à chaque fois. Elle avait pris soin d'attacher ses cheveux de manière à ce que ces derniers ne lui tombent pas sur le visage. Elle portait un vieux jean délavé et une blouse jaune paille. Ses cheveux étaient d'un blond cendré qui avaient des reflets de couleur miel dès qu'elle les exposait au soleil. Elle était menue et ne devait pas dépasser les 1m65. Je ne ressemblais pas beaucoup à ma mère mais plus à mon père. Les seules choses que j'avais héritées de ma mère étaient sa petite taille, son nez et ses deux fossettes qui n'apparaissaient que quand je souriais.  

« Bella ? » 

« Oui ! » 

« Bah t'étais partie où ? Ça fait deux fois que je te demande si tu veux qu'on aille peindre sur la terrasse ! » 

« Désolée ! Oui, je veux bien ! » 

J'aidais ma mère à sortir le matériel dehors. Nous nous étions donc installées sur la terrasse. Ma mère avait attrapé un pot de peinture et en avait jeté le contenu sur le châssis blanc posé sur le chevalet devant nous. Je l'avais regardé, incrédule mais l'esprit malicieux de ma mère m'avait fait sourire. J'avais fait de même avec un autre pot d'une autre couleur. Elle m'avait alors fixé, le sourire au visage se mordillant légèrement la lèvre inférieure, tout comme je le faisais très souvent. Nous avions ensuite éclaté de rire devant notre travail qui avait aussi arrosé le bois de la terrasse. C'est Charlie qui allait être content, j'avais alors pensé! Il avait déjà dû poncer et revernir la terrasse deux fois depuis que nous l'avions installée, il y a deux mois. Puis chacune d'entre nous s'était saisie d'un pinceau et le trempant ça et là dans les divers godets que ma mère avait préalablement rempli de peinture, nous avions chacune mis notre touche. Trouvant qu'il manquait quelque chose, nous nous étions tournées l'une vers l'autre simultanément et nous avions parlé d'une même voix. 

« Il manque quelque chose pour que ça soit parfait ! » 

Ma mère et moi étions très proches et nous n'avions pas besoin de nous parler pour nous comprendre. Un seul regard, un seul geste nous permettait de savoir ce que l'autre pensait. Lorsque nous peignions toutes les deux, c'était encore pire. Mon père était toujours fasciné quand il nous regardait peindre ensemble car d'un seul coup d’œil ou par un simple coup de pinceau, de fusain ou de crayon, nous arrivions à voir ce que l'autre allait faire et le résultat nous convenait systématiquement. Ma mère était plus qu'une maman, elle était ma sœur mais aussi ma meilleure amie. Petite, j'adorais passer du temps avec mes amies et amis de l'école mais dès que je rentrais chez moi, plus rien ne comptait à part ma mère. Ma mère et le dessin. Ma mère et la peinture. Il nous arrivait très souvent de mettre de la musique lorsque nous avions décidé de peindre. Nous pouvions peindre ensemble ou bien séparément. Mais ne nous peignions pas si l'autre n'était pas dans la pièce. 

Après avoir achevé notre œuvre, ma mère nous avait servi du thé glacé et nous nous étions installées sur la terrasse. Nous n'avions pas parlé pendant un moment mais au lieu de ça nos deux regards étaient fixés sur la toile. Quand j'avais tourné la tête, je m'étais rendue compte que notre petit jeu avait mis de la peinture dans les cheveux de ma mère et que sa blouse jaune paille était désormais mouchetée de bleu et de vert.  

« Pourquoi tu souris ? » me demanda-t-elle. 

« Regarde-toi tu es couverte de peinture ! » dis-je en la désignant. 

« Tu n'es pas mieux, tu as du bleu dans les cheveux ! » 

Et nous avions éclaté de rire. C'est le hurlement de mon père que nous n'avions pas entendu arriver qui nous avaient sorties de notre fou rire. 

« Mon dieu ! Non ! Pas la terrasse ! Pas encore ! Les filles sérieusement, je l'ai poncée le weekend dernier et je devais la vernir demain! » 

« Désolée papa ! » répondis-je en haussant les épaules. 

« Mon chéri c'est que de la peinture » reprit ma mère en se levant pour aller l'enlacer ! 

« Je peux pas vous laisser seule toutes les deux sans que vous me mettiez la maison sans dessus dessous ! Vous avez commencé par me virer de mon bureau et l'état du plancher est plus que lamentable maintenant et malgré vous avoir demandé de faire attention à la terrasse, vous avez encore mis de la peinture dessus ! Pfff va falloir que je passe mon dimanche à poncer ! » 

« Mon amour, je t'aiderai si tu veux ! » dit-elle en pouffant devant la tête dépitée de mon père. 

Nous nous étions alors regardées avec ma mère et nous avions explosé de rire. Mon père nous baragouinait des mots incompréhensibles que nous n'entendions pas dû à nos rires. Mon père avait fini par se dérider et avait commencé à rire avec nous. Mais il avait décidé à sa manière de nous faire payer notre manque de respect pour son travail comme il nous l'avait dit en nous demandant de poncer à sa place. Ma mère et moi avions haussé des épaules avant d'accepter. 

Fin du flashback

Après m'être rappelée de ces précieux souvenirs, je remettais les toiles dans le grand carton qui contenait toutes les toiles que nous avions peintes ensemble ou tout du moins toutes celles que j'avais pu emporter avec moi. J'ouvris un autre carton après avoir été cherché un sac poubelle. Dans celui-ci, nos albums photos. Il y avait des centaines de photos allant de ma naissance à ce jour fatidique du 13 juin. Je passais mon doigt sur le dernier cliché que mon père avait pris devant la maison. Ma mère avait un rendez-vous ce jour-là avec une galerie d'art qui souhaitait exposer ses toiles.

Flashback :  

« Chérie dépêche-toi ou tu vas être en retard ! » criait mon père en s'adressant à ma mère. 

« C'est bon j'arrive ! » lui répondit-elle alors qu'elle descendait les escaliers.

Ma mère était magnifique. Elle portait une magnifique longue robe bleu pâle à bretelles et elle avait attaché ses cheveux en un chignon lâche de telle sorte que certaines mèches venaient encadrer son visage. Elle s'était maquillée légèrement et avait mis une étole d'un bleu plus intense sur ses épaules. 

« Tu as mis les toiles dans la voiture ? » demanda-t-elle à mon père. 

« Oui ma chérie, Bella m'a aidé ! » 

« Vous êtes adorables tous les deux ! » nous répondit-elle. 

Ma mère avait le sourire et mon père le regard pétillant. Ils s'aimaient et j'étais heureuse. Ma mère m'avait rappelé mon rendez-vous avec le conseiller d'orientation pour mon passage au lycée de manière à ce que je puisse choisir des options en lien avec ce que je voulais faire plus tard. Je n'avais pas oublié et je lui avais promis que je m'y rendrais.  

« Chérie, tu veux bien te mettre sur le perron avec Bella, je voudrais faire une photo de vous deux ! » lui demanda-t-il. 

« Mon amour, on a pas le temps ! » lui répondit-elle. 

« Mais si.. allez ça va prendre trente secondes ! » reprit-il. 

« C'est toi qui me presse en me disant que je vais être en retard et maintenant tu veux que je prenne le temps de faire une photo ! » 

« Et bien oui, en fait j'ai avancé toutes les horloges de vingt minutes pour que tu ne sois pas en retard ! » 

« Tu n'as pas osé » dit-elle faisant semblant d'être vexée. 

Je souriais de les voir faire tous les deux. Ma mère avait les mains sur les hanches tentant d'impressionner mon père mais le sourire léger qui se dessinait sur ses lèvres la trahissait. Mon père, ayant repéré son manège, ne put s'empêcher de lui sourire et de lui répondre qu'elle n'avait jamais été à l'heure de sa vie mais que c'était pour ça qu'il était tombé amoureux d'elle. Elle avait su se faire désirer et que malgré les années, elle y arrivait encore pour son plus grand bonheur. Mon père lui avait rappelé ma présence et nous demanda de prendre la pause. Ma mère avait passé son bras autour de mes épaules et le mien enserrait sa taille. Nous avions souri tout en regardant mon père. Mon père en avait pris une autre sans que ma mère ne s'en rende compte au moment où elle me serrait dans ses bras dans une étreinte maternelle réconfortante. Nous étions sur le perron et ma mère me tenait entre ses bras, j'avais alors fermé les yeux pendant qu'elle déposait un baiser sur le haut de ma tête tout en esquissant un léger sourire.

Puis ma mère était partie en voiture alors que mon père partait pour le poste de police et moi pour mon rendez-vous. 

[Lisa Gerrard - « Sacrifice »]

J'étais rentrée en fin d'après-midi et avait été surprise de voir la voiture de mon père garée devant la maison. Il devait terminer à 23h et il était seulement 16h. La voiture de ma mère n'y était pas mais en même temps elle ne devait rentrer que vers 18h.  J'avais alors couru vers la maison. J'avais ouvert la porte à la volée pour savoir pourquoi mon père était rentré si tôt.
Je venais de franchir la porte quand je vis l'officier Biers dans l'entrée. Je lui avais souri mais le faible sourire qu'il m'offrait et le regard baissé qui s'en suivit ne me présageait rien de bon. Il déposa sa main sur mon épaule et m'indiqua le fond de la maison de la tête. Je m'étais retournée et je l'avais vu ressortir de la maison. La porte s'était refermée doucement derrière lui. 

« Papa ! » appelais-je alors que j'avançais un peu plus dans la maison. 

« .. ». Personne ne répondait. Je regardais dans la cuisine, personne. J'avançais encore me dirigeant vers le salon. 

« Papa ! Qu'est ce qui se passe ? Pourquoi... » m' interrompis-je alors que je rentrais dans le salon. 

Sue et Harry Clearwater étaient assis sur le canapé et Harry avait la main posée sur la jambe de mon père. Sue avait le regard strié de larmes et une main tenant un mouchoir devant sa bouche. Je me demandais ce qui se passait. C'est quand j'eus mon regard posé sur mon père, assis, prostré dans le canapé que je compris que quelque chose de grave était arrivé. Je n'avais jamais vu mon père pleuré mais le spectacle qui s'offrait devant moi était insoutenable. 

« Papa qu'est ce qui se passe ? Où est maman ? » demandais-je alors que je commençais à paniquer. 

« ... » 

« Papa ! » 

Mon père ne m'avait pas répondu. Il s'était levé et s'était dirigé vers moi doucement. Il avait les épaules baissées. Ses traits étaient tirés. Il me fixait et ce que je vis dans ses yeux comprima mon cœur de façon violente. Son regard empli de larmes me dévisageait en me faisant ressentir toute la souffrance et la douleur qu'il ressentait à cet instant. Mes larmes commençaient à couler sur mes joues de voir mon père si mal. Il était désormais devant moi. Les mains posées sur mes épaules et me regardait comme s'il cherchait à me dire quelque chose. Sa bouche s'ouvrit à plusieurs reprises mais aucun son n'en sortait. Je regardais alors Sue qui était en train de pleurer dans les bras d'Harry, son frère. Puis je tournais à nouveau la tête vers mon père qui avait baissé les yeux. Je pouvais sentir ses mains serrer doucement mes épaules.  

« Papa, qu'est ce qui se passe ! Pourquoi tu pleures ? » dis-je alors que les larmes silencieuses faisaient toujours leur chemin sur mon visage. 

« Ma chérie, il... il... faut que tu sois forte.. » dit-il. Il essuya ses yeux humides du revers de sa manche. 

« Papa, tu me fais peur ! » dis-je sentant mon cœur se serrer violemment. 

« Ta …  ta mère a eu …. » me dit-il alors qu'il se mit à sangloter de plus belle. 

« Quoi Maman, Papa, qu'est ce qu'il y a avec maman ! Sue ! Harry mais dites-moi quelque chose » demandais-je affolée. 

« Elle... elle  a eu un accident de voiture ma chérie ! » me répondit mon père dans un souffle avant de resserrer la prise sur mes épaules et d’émettre un bruit de sanglot étouffé. 

« .. » Je n'émis aucun son devant ce qu'il venait de m'annoncer. 

Ses mots faisaient leur chemin dans tout mon être se propageant tel du venin. Ma respiration se bloqua. Mes yeux s'embuèrent de plus en plus. Mon cœur venait de se briser. C'est comme si le vide avait pris possession de mon corps. Je venais de tomber du haut d'une falaise et mon corps plongeait à toute vitesse vers le fond sans que je ne puisse contrôler cette chute. Je ne pouvais pas le croire. Pas ma mère. Comme pour me prouver que je rêvais, je relevais la tête vers mon père. Je l’interrogeais du regard. Elle allait rentrer. Ma mère allait passer cette porte dans quelques minutes, dans sa belle robe bleue en affichant un magnifique sourire. Mais mon père affichait cette mine triste tout en bougeant sa tête de droite à gauche. Mon père m'attira alors vers lui. Je me blottissais contre lui, mes larmes dévalant de plus belles alors que je sentais celle de mon père qui étaient en train d'humidifier mon t-shirt. Nous étions restés plusieurs minutes dans les bras l'un de l'autre. Puis il se recula légèrement pour me regarder droit dans les yeux avant de me parler calmement. 

« Elle est à l'hôpital mais les médecins ne sont pas optimistes. Elle est dans le coma, elle a perdu beaucoup de sang et … » 

« On peut aller la voir ! » le coupais-je en relevant ma tête vers lui. 

L'espoir, c'est que je ressentais à cet instant. 

« Oui on va y aller ! » 

Ma mère n'était pas morte. Ce que je craignais le plus au monde n'était pas arrivé et je voulais la voir. Comme pour me prouver qu'elle était encore là, près de moi. Mon père m'avait emmené vers sa voiture et nous avions pris la direction de l'hôpital.

Une fois là-bas, nous avions attendu des heures dans la salle d'attente. Ma mère avait de nombreuses fractures dont une au niveau du bassin. Le médecin  ignorait si la colonne avait été touchée puisqu'elle avait dû être admise au bloc suite à la formation d'un caillot au niveau de son cerveau. Elle avait dû être opérée en urgence afin qu'il puisse diminuer sa pression intracrânienne ou un truc dans le genre. Je n'avais pas fait attention à tout ce que le médecin nous avait dit tellement la peur de la perdre me rongeait l'esprit.

Quelques jours après son opération, le médecin nous annonça que ma mère était dans un coma de type II et que par conséquent ma mère répondait aux stimuli douloureux mais de façon moins importante que quelques jours plutôt. Elle s'était enfoncée plus profond mais le médecin restait néanmoins optimiste car elle n'avait pas atteint le stade III où là le pronostic vital aurait été sérieusement engagé. 

Le temps passa et il n'y avait aucune amélioration. Chaque jour, dès ma sortie des cours, j'allais à l’hôpital. Mon père faisait tout pour que j'y passe le moins de temps possible surtout depuis que j'avais assisté à un arrêt cardiaque de ma mère deux mois et demi après son accident. J'avais été profondément choquée et j'avais frôlé la crise de catatonie. Mon père me surveillait de très près depuis. Mais je préférais être auprès de ma mère plutôt qu'à la maison où tout me rappelait elle. C'est ainsi que pendant quinze mois, je m'étais enfermée sur moi-même. Je passais mon temps à parler à ma mère dès que j'étais auprès d'elle pour continuer à la stimuler comme le disait le médecin. Je lui disais qu'elle me manquait, que je voulais à nouveau peindre avec elle et qu'il fallait qu'elle revienne parmi nous. Je lui parlais aussi de mes inquiétudes et de qui se passait dans ma vie. Je la tenais informée de mes résultats scolaires, qui contrairement à ce que les enseignants avaient pensés, étaient toujours excellents. 
Mes études, je m'y accrochais comme à une bouée de sauvetage. J'avais pris la résolution six mois après l'accident, de faire des études d'art. J'en avais parlé à ma mère comme lorsque j'avais recommencé à peindre. J'avais repris la peinture même si sans ma mère ce n'était plus pareil. La peinture était devenue mon exutoire. Je déversais ma colère, ma tristesse, ma peine, ma souffrance et mes espoirs dans chacune de mes toiles. Mon père quant à lui s'était plongé dans le travail et allait voir ma mère de moins en moins souvent. Cela lui faisait trop mal et il perdait espoir comme il me l'avait dit la fois où je lui avais reproché de l'abandonner. Nous ne vivions plus nous survivions, sans elle. Je gérais tout à la maison : les courses, le ménage, les lessives et mes études tout en continuant à aller voir ma mère dès que je le pouvais. Sue passait à la maison de temps en temps pour parler et réconforter mon père ou encore pour me donner un coup de main pour l'entretien de la maison. Pour ma part, j'adressais rarement la parole à mon père sauf pour lui dire bonsoir, bonjour ou bonne nuit. Je lui en voulais car il n'allait presque plus voir maman et il essayait de me convaincre qu'elle ne reviendrait pas. Mais moi, je voulais garder cet espoir qu'elle se réveille. Elle ne pouvait pas nous abandonner. 
Puis, ce matin-là, mes cours avaient été annulés car ma prof de littérature française était malade. Je m'étais donc rendue à l'hôpital. Il était 11h15. Je grimpais les marches menant au deuxième étage et à la chambre de ma mère. En arrivant dans le couloir, je vis mon père, assis par terre, déversant toutes les larmes de son corps. Je m'approchais de lui et plus j'avançais plus je me sentais mal. Des larmes silencieuses coulaient sur mon visage. Ma gorge était serrée et mes yeux naviguaient entre mon père et la porte de la chambre qu'occupait ma mère. Arrivée à côté de lui, mon père leva alors la tête et me regarda en oscillant sa tête de droite à gauche. Ça ne pouvait pas être arrivé, tout mais pas ça. Tout en regardant mon père, je reculais doucement sans quitter son regard, tout agitant ma tête de droite à gauche, comme pour m'empêcher d'admettre l'inévitable. Non, je devais rêver. J'allais me réveiller et me rendre au lycée avant d'aller voir ma mère cet après-midi dans sa chambre d'hôpital. Je fermais les yeux pour faire abstraction de ce qui m'entourait et quand je les rouvrirais, je serais dans mon lit. Je tentais par la même occasion de calmer ma respiration qui s'était emballée. Lorsque je rouvris mes yeux, tout était là. Les couloirs de l'hôpital où circulait le personnel soignant. Cette dame qui tenait dans ses mains un bouquet de fleurs. Cet enfant qui pleurait dans les bras de son père. Les bips des machines qui résonnaient dans le couloir. Mon père qui s'était levé et qui avançait vers moi le visage ravagé par les larmes. Et moi. Moi, dans ce couloir immaculé de blanc, au milieu de cet espace aseptisé qui accueillait ma mère depuis quinze mois. Et là, réalisant inacceptable je me mis à hurler. 

« Nooooooooooooooooooooooooooooooooooonnnnn »  

Je m’effondrais sur place accablée par la douleur. Je ne contrôlais plus mes larmes, ni mon corps. J'étais prise de spasmes et je n'arrivais plus à respirer. Un médecin arriva rapidement auprès de nous et demanda à mon père de s'écarter mais je tenais si fortement sa chemise que le médecin ne put s'approcher. Mon père tenta de me calmer avec des mots rassurants et en me frottant le dos mais je n'arrivais pas à revenir. Je sentais mon esprit quitter mon corps. Mes larmes dévalaient toujours le long de mes joues brouillant ma vue. Les sons devinrent des bruits, l’obscurité se fit progressivement et doucement je basculais dans le néant. 

Ce n'est que quelques heures plus tard que je me réveillais dans une chambre comme celle de ma mère. Mon père était resté auprès de moi. Au moment où je me redressais, il me prit dans ses bras et à nouveau des larmes affluaient dans mes yeux. Ma mère avait fait une rupture d'anévrisme m'avait-il dit. Mon pire cauchemar venait de se réaliser. Elle était partie. Elle nous avait laissé seuls, mon père et moi. 

L'enterrement eut lieu deux jours plus tard, mon père ayant refusé que celui-ci se déroule le jour de mes 16 ans. Nous avions fait quelque chose de simple comme elle.

Fin du flashback

Je tenais toujours entre mes mains cette photo, celle où ma mère me tenait dans ses bras tout en embrassant ma tête. J'essuyais la photo qui, pendant mes souvenirs, avait servi de réceptacle à mes larmes. Je m'essuyais les yeux avec le revers de mon gilet. Je rangeais la photo à sa place avec les autres. Puis je refermais le carton. Beaucoup de choses s'étaient passées depuis la mort de ma mère. Mais à chaque fois, j'avais trouvé la force de me relever. Cette force je la puisais dans la lettre qu'elle m'avait écrite. Celle qu'elle aurait dû me donner avec mon cadeau le jour de mes 15 ans. Celle que j'avais trouvée par hasard en rangeant l'atelier. Cette magnifique lettre de quatre pages où elle m'expliquait tout l'amour qu'elle ressentait pour moi mais aussi toute sa fierté. Celle où elle me disait que je deviendrai une belle jeune femme avec un caractère hors du commun ne se laissant pas abattre et passant avec rage chaque obstacle qui se présenterait. Cette même lettre où elle m'expliquait qu'elle ne se serait pas éternelle mais qu'elle continuerait à veiller sur moi malgré tout. A l'époque j'avais interrogé mon père à ce sujet car cette lettre c'est un peu comme si elle savait ce qui allait lui arriver. Mon père m'avait juste dit qu'une de ses amies lui avait dit de m'écrire une lettre et de mettre ses affaires en ordre et comme à chaque fois elle l'avait écouté. Cette même amie lui avait annoncé, il y a plusieurs années, qu'elle était enceinte de moi alors que même ma mère l'ignorait. Quand ma mère avait fait son test de grossesse, elle était seulement enceinte de 2 semaines. Depuis   ce jour, ma mère écoutait cette femme que je n'avais jamais rencontrée. Je secouais la tête afin de chasser mes pensées et revenir à ce pourquoi j'étais dans cette pièce.

J'amenais les quatre cartons dans ma chambre, glissant le plus grand, celui de ses toiles et des nôtres sous mon lit. Je plaçais les trois autres au dessus de mon armoire. Je retournais dans l'autre pièce afin de regrouper les pots de peintures et mon matériel à dessin dans deux cartons. Je jetais tout ce que j'avais entassé depuis mon arrivée à New York, les différentes chutes de papiers usagés, les tubes de peintures qui étaient vides ou trop secs pour pouvoir être utiliser, les toiles qui étaient déchirées ou trop abîmées,... Je mis mon chevalet dans un coin du salon avec ma dernière toile que j'avais recouverte d'un drap. Il s'agissait du visage d'Alice et je ne souhaitais pas que Jazz puisse la voir pour l'instant.

Une fois tout ce rangement terminé, je descendis mes deux sacs poubelles dans le local situé au sous sol de l'immeuble. Je fis un nettoyage complet de la pièce et quand je relevais la tête il était déjà 16h. Je décidais d'aller prendre une douche et me changer car j'étais pleine de poussières. Une fois sortie de la douche, je dépliais le canapé lit et ôtais la housse de manière à la laver. Je déposais des draps et la couverture qui était dans le coffre qui appartenait à mon père sur le lit. J'ouvris un peu la fenêtre histoire d'aérer. Puis je retournais dans le salon. Ayant faim, je me préparais un sandwich et m'installais dans le canapé devant la télé.

Une heure s'était peut-être écoulée ou peut-être deux quand je réalisais que je n'avais pas appelé mon père depuis longtemps. Je savais qu'il devait partir pour le Brésil et un coup d’œil sur le calendrier fixé derrière ma porte d'entrée me fit prendre conscience qu'il partait dans trois jours. Je me saisissais donc du téléphone quand on frappa à la porte. J'ouvrais la porte. Jasper et Emmett se tenaient devant moi. Je repoussais donc l'appel que je voulais passer et les fis entrer. Jasper avait deux valises, une dans chaque main et Emmett tenait un carton. Je les invitais à me suivre jusqu'à la pièce qui allait servir de chambre à Jasper. Ils firent deux ou trois allers-retours avant de venir s'installer à mes côtés sur le canapé.

« Ça y est vous avez fini ? » leur demandais-je.

« Ouais ! » me répondirent-ils ensemble

« Vous voulez manger quelque chose ? » leur proposais-je.

« Non, en fait, il faut qu'on aille rejoindre Ed' chez moi ! On a mis deux extras pour gérer le bar et il doit être inquiet donc on va aller les relever ! »

« Comme vous voulez ! Ah au fait Jazz, tiens voilà les clés de l'appartement ! Je pense que ça pourrait être utile parce que je ne vais pas rester éveillée pour t'attendre ! »

« Ouais Bella pas de souci ! Merci encore ! »

« De rien ! Bon bah c’est pas tout ça mais on va y aller ! Hein Jazz ! » reprit Emmett.

« Tu veux venir avec nous ? » me demanda Jazz.

« Euh.. non Jazz.. je suis désolée mais..je .. » hésitais-je. … t'as pas envie de voir Edward.. bah dis-lui...

« C'est bon j'ai compris ! » me répondit-il.

« Mercii » répondis-je.

« Allez Em' on y va ! Bonne nuit Bella et à demain ! »

« Ouais Jazz à demain ! »

« Bye Belly ! » me dit Emmett avant de faire claquer un bisou sur ma joue après m'avoir attiré vers lui en m'attrapant par l'épaule.

« Bye Em' » lui répondis-je en lui rendant son bisou.

Les deux quittèrent mon appartement. Je fermais l'appartement à double tour en pensant à ne pas mettre le loquet de sécurité sinon Jazz ne pourrait pas rentrer. Puis je m'installais avec mon pot de glace devant une série américaine que j'appréciais pour sa légèreté « Friends ». Je regardais deux ou trois épisodes avant d'éteindre la télé et de partir me coucher. Demain serait un autre jour. Mon premier jour de colocation avec Jasper et j'espérais que tout se passerait bien. Jasper était un garçon très gentil que j'avais appris à connaître depuis trois ans. Je l'avais toujours connu avec Alice et cela me semblait inconcevable que ces deux-là ne soient plus ensemble mais Alice avait été abjecte et elle récoltait ce qu'elle avait semé. Je me demandais malgré tout qu'elle avait été sa réaction quand elle s'était aperçue que Jazz avait récupéré toutes ses affaires derrière son dos et qu'il avait quitté l'appartement. J'avais aussi hâte d'ouvrir la galerie mardi matin car les deux jours qui s'annonçaient risquaient d'être des plus ennuyeux. Je n'avais rien à faire et ne voulant plus voir Alice, il allait bien falloir que je m'occupe. J'avais une idée mais je préférais attendre demain matin pour me décider. La nuit porte conseil dit-on.


Disclaimer : Tous les personnages appartiennent à Stephenie MEYER et l'histoire m'appartient...

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